Analyse des données du Treatment Demand Indicator (TDI) 2011-2015
« Qu’on ne cherche pas dans ce livre cette exactitude géographique qui n’est jamais qu’un leurre : le Guatemala, par exemple, n’existe pas. Je le sais, j’y ai vécu. »
Le salaire de la peur, Georges Arnaud, 1950
Faisant notre cette phrase en exergue du « Salaire de la Peur », nous tâcherons de faire l’état des lieux de la collecte de données épidémiologiques en Région Bruxelles-Capitale sans prétendre décrire une réalité uniforme, donc illusoire, de la consommation de drogues.
Depuis 2011, 94.156 épisodes de traitement ont été encodés dans la base de données TDI, dont 8234 pour la seule région bruxelloise. De 496 cas encodés par neuf institutions bruxelloises en 2011, nous sommes passés à 2896 épisodes encodés par 28 institutions en 2015.
Si cet encodage représente l’effort le plus conséquent de décrire la situation épidémiologique en matière d’assuétude de ces dernières années en Belgique et au niveau européen, il souffre de plusieurs défauts : 40% des cas sont sans Numéro d’Identification à la Sécurité Sociale belge (NISS), soit que les personnes prises en charge n’en disposent pas, soit que les institutions participant à l’encodage se refusent à identifier ce public fragile et sensible pour des raisons éthiques ou pratiques ; seul un des services de santé mentale existant, pourtant tous concernés par les problèmes d’assuétudes, participe à l’enquête ; le nombre d’institutions participantes a évolué au cours du temps rendant toute étude longitudinale impossible ou à minima biaisée (seuls les centres anciennement INAMI représentent un échantillon constant) ; la prise d’informations parfois étalée dans la durée, lors d’entretiens successifs, ne correspond pas nécessairement aux objectifs initiaux de l’enquête d’analyse de demande de traitement ; la dichotomie des objectifs poursuivis par l’enquête qui vise d’une part à établir le profil sociodémographique des patients et d’autre part des modes de prises en charge d’institutions aux vocations fort différentes.
Le principal écueil de cette analyse reste de ne pas tenir compte de la prise en charge des patients par les médecins généralistes, une prise en charge qui, si elle ne peut être mesurée est, au regard du relevé de l’administration des traitements de substitution dans Pharmanet, forcément significative.
Néanmoins, nous nous interrogerons autour de quelques questions spécifiques : Les drogues ont-elles un sexe ? Le fumeur de joint à 20 ans sera-t-il alcoolique à 40 ? Les centres de traitement fabriquent-ils la dépendance ? Le patient toxicomane dépendant est-il forcément poly-consommateur ? Quelle organisation du système de santé est la plus adaptée à la prise en charge des patients toxicomanes ?
Par Pierre Mallebay-Vacqueur